Historique
Les débuts de Baie-Comeau
Extraits du livre Baie-Comeau, au fil du temps (pages 24 à 49)
« L’incorporation de la nouvelle ville de Baie-Comeau, le 20 mai 1937, marque, bien sûr, le début d’une belle aventure. Mais cette date représente aussi la conclusion d’un projet déjà vieux de 14 ans! En effet, c’est le 30 janvier 1923 que le colonel Robert Rutherford McCormick, un important industriel américain, s’engage auprès du gouvernement provincial, à développer cette région isolée de la Côte-Nord.
En 1911, seulement âgé de 31 ans, le jeune McCormick devient le président du conseil d’administration d’un des plus grands quotidiens américains, le Chicago Tribune. Pour survivre à la concurrence et abaisser les coûts de production, il réussit à convaincre les actionnaires de lui avancer une somme d’un million de dollars afin de réaliser une idée audacieuse : construire sa propre usine de papier journal!
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Après l’avoir personnellement explorée, McCormick fait acheter, en 1915, les droits d’exploration des forêts de la rivière aux Rochers, sur la Côte-Nord.
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Mais l’engagement des États-Unis d’Amérique, en 1917, dans la Première Guerre mondiale retarde l’aménagement permanent de la concession. McCormick s’enrôle dans l’armée américaine, combat en France et gagne ses galons de colonel.
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En 1922, le colonel McCormick charge donc le gérant de Baie-des-Cèdres (Franquelin) d’explorer plus à fond les environs des rivières Manicouagan et Outardes : le rapport forestier est positif.
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Le soir du 30 janvier 1923, il obtient donc le bail des forêts à l’est de la rivière Manicouagan, au coût astronomique de plus de 6 000 dollars par année, le tout assorti de l’obligation de construire, dans les 7 ans, une usine de pâte ou même de papier dans les environs immédiats de la péninsule. Le projet Manicouagan est né et il faudra, en réalité, 14 ans pour le compléter.
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Jusqu’en 1930, le plus gros chantier de la région est à la chute de la rivière aux Outardes où plusieurs centaines d’ouvriers s’installent chaque été.
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À plus de vingt kilomètres de là, au nord-est, les travaux d’érection du quai de Comeau Bay sont plus tardifs, car ils ne débutent qu’en 1930.
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Puis survient le krach boursier et ses conséquences dépressionnaires sur l’économie. Les délais de construction se multiplient. Pendant cette longue pause, qui s’étend de 1930 à 1934, les parages de Baie-Comeau sont bien calmes.
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En 1934, vu l’importance des investissements déjà effectués, le colonel McCormick décide d’aller de l’avant avec le projet Manicouagan, mais à la condition expresse de renégocier les clauses du contrat original de 1923.
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Début avril 1936. La baie à Comeau est encore assoupie sous la neige qui la recouvre. À son réveil, elle ne sera plus jamais la même. Au cours des prochains mois, cette forêt presque intacte et ce quai qui avance dans la mer dont les abords sont encore recouverts de glace connaîtront une activité intense.
Tout a été planifié : une ville et une usine à papier s’élèveront au cœur de cette solitude. Déjà, des hommes partis de Franquelin et de Shelter Bay arrivent pour préparer le site.
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Si 1936 a vu la naissance d’un grand chantier à Baie-Comeau, 1937 voit la naissance d’une vraie ville. Dès avril, la demande est faite à la législature provinciale d’incorporer la ville de Baie-Comeau. Il est à noter que le nom de la ville avait été choisi depuis 1929, suite à l’ouverture d’un premier bureau de poste fédéral qui est baptisé « Comeau Bay ».
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Les lettres patentes seront délivrées le 20 mai 1937 et un Conseil municipal formé de cinq échevins est nommé.
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Pendant que la vie municipale se structure, la construction se poursuit. Une date est fixée pour la mise en opération de la première machine à papier : le 15 février 1938. Au cours du mois d’octobre, de la grande visite arrive en ville : le Conseil d’administration du Chicago Tribune au grand complet vient se rendre compte de visu du miracle de Baie-Comeau. Le colonel McCormick, à leur tête, n’en est pas peu fier.
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Toutes les pièces de l’échiquier d’une ville sont en place. La vie religieuse a aussi pignon sur rue. Au cours de l’automne, l’église anglicane, de dimensions modestes, s’élève sur la rue Carleton; elle est prête pour le culte le 10 novembre.
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Au début d’octobre, un hôpital de 20 lits est pratiquement prêt à recevoir ses premiers patients.
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L’année 1937 se termine donc sur un constat : devoir accompli. Tout est en place pour qu’enfin Baie-Comeau fasse sa marque comme métropole de la Côte-Nord. Cette année-là, 104 maisons ont été construites par la compagnie. Des particuliers en ont érigé 10. L’avenue LaSalle, l’artère commerciale de la ville, très large, comporte maintenant, outre l’Arcade, plusieurs commerces, dont un hôtel. La compagnie fournit même le chauffage à ces bâtiments commerciaux : des tuyaux transportent de la vapeur provenant de l’usine. Cette dernière a commencé à tourner sans relâche. On ne craint donc plus pour l’avenir de la ville!
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En 1947, Baie-Comeau fête ses dix ans : le rêve du colonel McCormick s’est bien matérialisé sur les bords de l’anse à Comeau. Si la ville était un être humain, on dirait qu’elle termine une enfance heureuse car, au cours des quinze années suivantes, elle vivra plutôt une sorte d’adolescence où les poussées de croissance seront très spectaculaires.
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Le boom économique des années 50 ne fait pas que marquer le paysage industriel, il transforme radicalement la physionomie urbaine car il faut loger ces milliers d’ouvriers qui font passer la population locale de 4 225 habitants, en 1951, à près de 14 000 dix ans plus tard.
À Baie-Comeau, la population va doubler, passant de 4 255 à 7 956 personnes , en 10 ans (1961). Des rues et des maisons apparaissent du côté de la future paroisse Saint-Nom-de-Marie, à l’ouest du mont Sec, mais c’est plutôt au nord, près de l’aluminerie, que va se concentrer l’expansion. Tout un nouveau quartier se développe autour des lacs Aber et Leven, qui devient, en 1957, le quartier Saint-Georges.
Hauterive, la ville créée sous l’impulsion de Monseigneur Labrie, profite aussi de cette nouvelle expansion. Après des débuts difficiles, placés sous le signe de l’entraide et de la coopération, les progrès sont bientôt spectaculaires. Douze ans après sa naissance, en 1961, la jeune ville compte plus de 6 000 habitants! Aux premières maisons du boulevard Joliet et des rues de Puyjalon et Bossé se sont ajoutés d’autres bâtiments; les rues quadrillent maintenant tout le plateau jusqu’à la route nationale. De plus, la croissance démographique attribuable à l’arrivée de l’aluminerie dans la région mène à la construction de nouvelles rues, en bas de la falaise, à proximité des ruines du Vieux-Poste.
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Bref, 25 ans après la fondation de la ville, Baie-Comeau se compose d’une société encore secouée par les soubresauts d’une croissance économique phénoménale. Une nouvelle population, plus ou moins enracinée, s’est ajoutée aux familles pionnières sidérées par l’impact des grands projets hydroélectriques, industriels et portuaires qui ont transformé leur univers.
Ressource et collaboration
La Ville de Baie-Comeau tient à remercier la Société historique de la Côte-Nord pour le contenu de cette section. Pour consulter ou pour vous procurez le livre Baie-Comeau au fil du temps :
Société historique de la Côte-Nord
2, place La Salle, Baie-Comeau
Téléphone : 418 296-8228
Courriel : shcn@globetrotter.net
Site Internet : www.shcote-nord.org